La poursuite


Le chef baisse son arme d'étonnement, laissant ainsi à ses hommes le temps suffisant pour fuir. Il reste seul face à la jeune femme, séparés par la barrière de feu. L'homme relève son arme et la pointe vers la femme.
-  Je n'ai pas peur de toi, je vais te tuer et je vais récupérer le gosse. Je n'ai pas peur de toi tu n'es rien qu'une femme qui fait de la magie. Tu vas MOURIR !
Il est en pleine crise de démence, il tire à maintes reprises en direction de la femme mais aucun des projectiles ne l'atteint, elle est protégée par le mur de feu.  Il jette l'arme vide vers elle et se lance dans sa direction.
Elle sait que l'homme n'abandonnera pas, qu'il est une machine à tuer. Que sa mission est de récupérer son enfant et qu'après il se débarrassera d'elle. Que plus elle l'occupera, moins il aura de temps à consacrer à la poursuite de son fils. Le revolver s'écrase à ses pieds, elle aperçoit l'homme venir en courant vers elle, elle attend qu'il soit suffisamment proche de lui et s'enfuit à toute jambe. Il faut qu'il parte à sa poursuite. Surtout qu'il n'abandonne pas pour repartir à la recherche de son fils. C'est pour ça qu'elle l'attend, pour exciter son instinct de chasseur. S'il la voit, il pense qu'il peut l'attraper et tant qu'il est à ses trousses il n'est pas après l'enfant.
        Arzhela est exténuée, le lien qui l'unissait à sa descendante vient de se rompre. Elle comprend la stratégie de la jeune femme mais constate que plus rien n'est en son pouvoir pour lui prêter main forte. Arzhela ne peut que suivre la fuite de sa descendante, désormais elle seule est maître de son avenir.
        La jeune femme s'enfuit dans la forêt, à l'opposé de l'endroit par où elle était arrivée à la clairière. Elle veut s'éloigner de l'endroit où se cache son fils et entraîner son poursuivant avec elle. L'homme la suit de près, mais la jeune femme conserve toujours la même distance entre eux. Elle n'est pas une grande sportive mais l'instinct de conservation la pousse à tenir. Elle aperçoit un petit chemin sur sa droite et l'emprunte. Le chemin très étroit, monte tout doucement au début puis devient rapidement escarpé. Elle n'arrive plus à courir et se met à marcher, l'homme à sa poursuite en fait autant. La pente se radoucit, bien qu'elle soit à bout de souffle elle reprend sa course. L'homme prend un peu plus de repos et l'écart se creuse. Elle arrive au sommet de la colline et distingue avec peine le chemin au milieu du reste de la végétation. Elle est entourée d'arbres, au loin elle entend l'homme la héler, elle se retourne suffisamment rapidement pour constater qu'il est très loin. Elle refuse de ralentir et continue sa course sur le chemin. Elle entend un claquement sec, se retourne, l'homme tient une arme en l'air et vient de tirer. Elle entend qu'il lui crie quelque chose mais ne comprend pas ce qu'il lui dit. Il s'énerve et vocifère, mais la jeune femme tient bon, elle ne s'arrête pas pour autant. Le chemin sort de la forêt et redescend vers une plaine. La jeune femme repart de plus belle,  elle a maintenant une avance beaucoup plus confortable. Plus la distance qui les sépare augmente plus l'homme tempête et gesticule en pointant son arme vers le ciel. Le chemin devient caillouteux, instable. La course est de plus en plus difficile, elle ne se retourne pas, se convaincant que cela est aussi difficile pour l'homme à sa poursuite.  Le passage se rétrécit, le sol s'est transformé en rocher. Il lui est très pénible d'avancer dans ces conditions, l'homme regagne du terrain. Elle est obligée de stopper subitement sa course, elle se retrouve face à une petite falaise de trois mètres de hauteur.  Elle n'aperçoit aucune autre issue dans les environs, elle est dans l'obligation de passer par là. Elle s'accroupit, s'appuie sur les mains et laisse ses jambes basculer dans le vide. Elle sent sous son talon droit une légère aspérité, elle place son pied perpendiculairement en prenant appui tant bien que mal sur la proéminence du rocher à cet endroit.  Puis d'un mouvement vif, s'élance et fait un demi tour pour se retrouver face au rocher. Elle se retrouve face à l'homme qui n'est plus qu'à une vingtaine de mètres d'elle. Son visage est tiré, de la bave s'échappe de ses lèvres, il n'a plus l'allure d'un être humain mais bien celle d'un prédateur en quête de sa proie. Elle se laisse tomber pour se retrouver suspendue à bout de bras. Elle ressent une douleur atroce aux épaules, son corps n'est pas habitué à ce genre d'exercice. Elle s'est éraflée le visage contre une partie du rocher qui dépassait, elle sent des brûlures sur sa joue, la souffrance est insupportable. Elle aperçoit des lumières brillantes clignoter dans son champs de vision. Elle a peur de s'évanouir, se ressaisit, ouvre grand les yeux, se dit qu'elle doit tenir encore, tant qu'elle sera en vie face à l'homme, son enfant sera en sécurité.  Le sol n'est qu'à un bon mètre de ses pieds, elle lâche prise, se laisse tomber. Elle se réceptionne correctement sur les pieds, mais bascule en avant et se cogne la tête contre la paroi rocheuse bien qu'elle se soit protégée en mettant ses mains en avant. Elle a l'illusion de voir un grand flash blanc et reste hébétée quelques secondes. Elle entend l'homme au dessus d'elle qui manœuvre tant  bien que mal pour descendre le mur et en profite pour reprendre sa course. Celle-ci est nettement plus erratique, la vision de la jeune femme est diminuée, elle est très fatiguée. Le chemin rejoint un sentier de terre qui lui semble être utilisé plus fréquemment, elle continue à courir s'étonnant de réussir à trouver les ressources pour tenir encore. Au loin elle aperçoit des habitations, pour les atteindre elle doit descendre le chemin plusieurs centaines de mètres, traverser un ruisseau et remonter le long d'une colline pendant plus d'un kilomètre. Elle espère que des gens vont sortir, vont la voir et l'aider. Mais pas trop tôt, sinon l'homme va abandonner sa poursuite pour repartir à la recherche de son enfant. Il faut que les gens voient l'homme la poursuivre. Elle arrive au niveau du ruisseau, ralentit. Il y a de l'herbe par terre et quelques grosses pierres. La jeune femme regarde au loin le chemin qui remonte, n'aperçoit pas une des grosses pierres, pose son pied gauche dessus, trébuche et se tord la cheville. Elle entend un craquement, et ressent une terrible douleur dans sa cheville. Elle se dit qu'elle ne doit pas s'arrêter et tente de marcher. Poser son pied gauche sur le sol se transforme à chaque fois en un calvaire. Elle refuse de se retourner pour ne pas voir l'homme arriver sur elle, la blessure sur son visage lui fait horriblement mal. Ses bras, ses jambes et maintenant sa cheville, tout son corps la fait souffrir. Des larmes de désespoir lui coulent le long des joues, elle est éreintée. Elle traverse le ruisseau et pense qu'elle est pratiquement hors de danger. Pour niveler le bord de l'eau on a construit des paliers en terre qui sont maintenus par des troncs d'arbres. Les plus proches de l'eau sont trempés, la jeune femme pose le pied droit sur le premier, son pied glisse sur le bois, elle perd l'équilibre et tombe en avant. Elle s'étend de tout son long, la tête face au sol. L'homme arrive en hurlant :

-  Je savais que je te rattraperai !!! Je t'ai dit que je te tuerai !!! Tu vas mourir et je retrouverai ton fils. Il ne fallait pas vouloir te mesurer à moi.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire